Soleil amer

Nous sommes en Algérie à la fin des années 50. Naja est seule pour élever ses trois filles. Son mari Saïd est parti en France gagner de l’argent et subvenir aux besoins du foyer. Mais la vie est dure en Algérie et le seul moyen pour cette famille de résister, c’est de rejoindre Saïd en France avec tous les espoirs que cela porte et toutes les désillusions que cela apportera à l’ensemble de la famille. Début des années 60 ; la famille est réunie et les enfants grandissent. Saïd et Naja se retrouvent et une quatrième grossesse découle de ces retrouvailles. Mais Saïd a changé. La difficulté du métier, l’éloignement de la famille, sa vie en solitaire, il est bien différent du Saïd que Naja connaissait en Algérie. Bientôt les coups pleuvent, sur la mère, sur les enfants, avec une petite exception pour la petite dernière qui reste la préférée du père, mais l’ambiance générale n’est pas au beau fixe. Le seul plaisir de Naja, c’est ces discussions avec les amies de la barre HLM et celles avec sa belle-sœur qui l’aide dans sa grossesse et dans la vie quotidienne, notamment pour l’apprentissage de la lecture afin de faciliter son intégration. Arrive finalement l’accouchement de Naja et la naissance du petit Amir. Saïd reprend espoir avec l’arrivée de ce garçon. Mais Amir n’est pas l’enfant rêvé, le garçon fort qu’un père de cette époque attendait pour devenir l’homme de la famille. Et encore plus difficile, un lourd secret se cache derrière la naissance du fils de la famille qui va l’entraîner dans des mensonges, des dissimulations et des non-dits. Les années 70 arrivent. Les enfants ont grandi mais Saïd ne change pas. L’une des filles est retourné au pays, mariée. Les autres enfants du couple s’épanouissent un peu comme ils le peuvent et en particulier le petit Amir qui développe certaines facilités d’apprentissage malgré un faible physique qui ne le rend pas attirant au regard de son père. Mais le secret lié à la naissance d’Amir est toujours aussi perturbant pour la famille et la situation ne fera qu’empirer. Les années passent et la famille Algérienne qui espérait trouver le bonheur à son arrivée en France va de désillusions en désillusions jusqu’à ce que l’impensable se produise… Lilia Hassaine, qui a eu un succès inattendu après l’écriture de son premier roman, nous offre un deuxième roman tout aussi réussi. Cette histoire met en avant des femmes toutes plus fortes les unes que les autres dans un environnement et une période où leur situation familiale n’était pas toujours évidente voire très difficile. Sur ce sujet fort, basée sur une écriture poignante, l’auteure nous présente une famille déchirée et pour laquelle l’intégration sera de plus en plus compliquée. On imagine la difficulté d’une mère à vouloir donner le meilleur pour ses filles et son fils alors que les dés semblent pipés. C’est poignant, c’est fort, c’est bien écrit et ça sonne juste. Cette histoire laisse à réfléchir sur la situation des femmes de cette époque et plus généralement sur la difficile intégration des immigrés qui ont pourtant participé à l’enrichissement de notre pays. Un très beau roman à découvrir.